18 Février 2014
A l'occasion du 16e Festival des Créations Télévisuelles de Luchon qui se tenait du 12 au 16 février dernier, NewsTele.com est allé à la rencontre du scénariste et réalisateur Yves Angelo.
Son dernier film « Des Fleurs pour Algernon », prochainement sur Arte, a reçu pas moins de trois récompenses lors de ce festival (voir notre article «Des Fleurs pour Algernon» (Arte), grand vainqueur du 16e Festival TV de Luchon).
Nicolas SVETCHINE (Svet Prod/Newstele) : Cette fiction est très audacieuse sur bien des aspects, notamment sur le fait de faire un téléfilm qui repose sur le principe du monologue durant une heure et demie. Arte a de suite été emballée par ce projet?
Yves Angelo : Dans ces temps où tout le monde est un peu frileux, où tout est assez formaté, il y a cette espèce d'envie de plaire absolument, au plus grand nombre, sans favoriser l'effort du téléspectateur à une réflexion ou simplement à une vision mais au contraire le laisser au repos.
Arte a été formidable car dans cette collection, ce qui les intéressaient, c'était l'originalité de l'approche d'un texte théâtral transcrit en images.
C'est cette originalité là qui était le fer de lance de la collection. Ils ont adhéré assez facilement je crois à cette idée de filmer un seul personnage en monologue pendant une heure et demie.
Il faut dire cependant qu'ils connaissaient le spectacle et que ce dernier tient magnifiquement en une heure et demie, il n'y a absolument aucun ennui, aucune lassitude. On est accroché à ce personnage donc personnellement j'avais cet atout là. Et Arte aussi, forcément.
N.S : Gregory Gadebois nous livre un jeu d'acteur épatant... Il incarne ce rôle de Charlie avec beaucoup de justesse...
Y.A : L'envie du film est née, aussi, du fait qu'il était personnage et qu'il interprétait ce personnage au théâtre. C'est un comédien assez singulier dans le paysage audiovisuel parmi les acteurs français, il a un potentiel évident. C'est l'acteur qui provoque en vous ce désir de le filmer.
N.S : C'est un film qui amène à de nombreuses réflexions...
Y.A : Oui, le film amène à une réflexion métaphorique : cette histoire on peut la décliner à travers plusieurs axes. Elle crée, elle engendre plusieurs symboliques et métaphores : l'apprentissage du savoir, l’intelligence, les différences créées par l'intelligence et ses conséquences...
Chacun, en fonction de sa propre sensibilité, peut appréhender cette histoire en fonction de la métaphore qu'il choisit vis-à-vis de lui même.
N.S : Avez-vous bénéficié d'une entière liberté de la part du diffuseur pour développer ce projet ?
Y.A : Oui, j'ai été totalement libre. Il n'y a jamais eu de volonté d'interférer dans la préparation du film, dans le choix des décors, sur le tournage ou lors du montage... absolument pas.
N.S : Aujourd'hui, on ne peut compter que sur Arte pour accorder une place au développement de ce type de fiction ?
Y.A : Je crois, oui. Ce film ne pouvait être produit que par Arte.
Pourtant, on voit bien dans la façon dont les gens reçoivent le film que ce n'est pas parce qu'un film semble difficile qu'il ne peut pas être vu avec plaisir. Il n'y a aucune difficulté à cela, seulement, souvent on sous-estime les gens tout simplement et on les cantonne dans cette espèce de tiédeur ambiante qui consiste à ne pas faire d'efforts à la vision d'une œuvre...
Dommage que les diffuseurs ne s'intéressent pas davantage à ces projets plus iconoclastes, plus ambitieux, plus difficiles qui demandent une réflexion plus grande mais qui apportent à chacun ce petit quelque chose qui fait que l'on progresse chaque fois que l'on est en contact avec une œuvre, même de façon infime.
N.S : Lorsque la publicité après 20h a été supprimée sur le service public, on aurait pu s'attendre à voir arriver des fictions plus audacieuses comme la votre puisque la case horaire était ainsi déchargée des contraintes d'audiences. Finalement, rien a vraiment changé...
Y.A : Absolument oui, c'est exactement ça. La suppression de la publicité n'a rien changé. Le fait d'enlever la publicité, c'est en fait changer le maquillage tout simplement mais la personne, elle, ne change pas.
Aujourd'hui, c'est la distraction qui prime sur le service public alors qu'auparavant on essayait d'apporter une certaine réflexion.
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Crédit Photo : Maxpp